veulent supprimer la valeur de 1'esclave et, par conséquent, la cupidité de s'en procurer chez les Arabes? Dans 1'Oubanghi, dans le territoire francais occupé par 1'Etat, c'est pourtant une affaire encore plus grave. L'esclavage existe chez les Nzakaras, les Yakomas, enfin chez tous les peuples du Haut-Oubanghi aussi bien qu'ailleurs.

C'est un esclavage patriarchal et les Gouvernements n'y changeront rien. Les premiers temps ils doivent se borner k ouvrir leurs stations aux esclaves maltraités qui fuient leurs maitres (ce qui arrivé rarement) et è. empêcher autant que possible les sacrifices humains.

Puis, les gouvernements doivent donner 1'exemple d'employer des hommes libres au travail, de prêcher toujours contre l'esclavage comme institution barbare, et de défendre tous ceux qui veulent s'y soustraire.

L'Etat Indépendant du Congo, loin de remplir ces devoirs, achête des hommes contre dés fusils & piston, toujours sous prétexte de les libérer après qui'ils auront servi 1'Etat pendant sept ans. Comment voulez-vous que les indigènes abandonnent l'esclavage, si un Gouvernement leur donne 1'exemple de le pratiquer?

Ne croyez pas, Monsieur le Délégué, que les hommes achetés par 1'Etat ont la moindre idéé d'être libérés, car le plus souvent on les attaché avec des chaines ou avec d'énormes bloes aux pieds, jusqu'a ce qu'il soient hors de leur pays, sans quoi ils s'évaderaient. Et voyez encore ÈL quels abus ces achÉts d'esclaves par 1'Etat donnent lieu.

Un homine n'a besoin de rien, il est heureux dans son village, il a' son are et ses flêches, ses bonnes zagaies, il adore sa familie, son frère surtout. Son frère? enfin ce n'est pas son frère; c'est un esclave de-sa familie; mais enfants, ils ont joué ensemble; hommes, ils se sont mariés et ont des enfants, qui eux aussi se considerènt comme frères et soeurs.

L'esclave a oublié tout-è,-fait qu'il n'est pas 1'égal de son maltre, le maitre ne pense jamais que son frère est son esclave.

Vient la t.entation sous la forme imaginée par 1'Etat Indépendant du Congo, un fusil a piston. L'homme se rappelle qu'il peut se procurer cette arme avec un esclave; son frère, n'est- il pas son esclave? II résiste, essaye d'oublier, mais depuis le paradis, c'est toujours la même hisloire: il succombe. Sous prétexte de vendre quelquechose & la station de 1'Etat, il emporte son frère, son ami d'enfance, son esclave, hélas et bientót 1'Etat Indépendant compte un „libéré" de plus qu'on a vlte mis è, la chaine, car il n'apprécie pas sa libération, et, dans le village, uue femme pleure son mari, des enfants crient en vain après leur pére,